La première fois que j’ai été deux

27 août 2018

"Deux histoires familiales tarabiscotées ne pouvaient aboutir
qu'à une histoire d'amour compliquée...
"

Jullien-Nogarède Bertrand
350 pages
Éditions Flammarion (2018)
Collection jeunesse
«Le scooter de Tom nous emporta loin du monde. Mes bras entouraient sa taille et je laissai ma tête reposer doucement sur son épaule. Je ne crois pas avoir été plus heureuse qu’à cet instant. Juste une fille comme les autres. Il avait suffi qu’un anglais à cravate surgisse de nulle part pour que mes pieds ne touchent plus le macadam.
J'étais vraiment folle amoureuse.»
Extrait :

« Je ne crois pas comme certains qu’un bouquin peut vous en apprendre plus que la vie. Vous tirerez toujours quelque chose d’un livre. Point. La vie c’est une autre affaire. Avec un roman, je garde la main. C’est moi qui décide. Je lis le nombre de pages que je veux, je saute un passage qui me lasse, je renonce finalement à lire parce que le sommeil me gagne. Essayez de pratiquer de la sorte avec votre existence ! Tintin ! Elle n’en fait qu’à sa tête. Vous croyez décider mais vous êtes la proie de toutes sortes de circonstances. Ce sont elles qui vous ont choisies et non l’inverse. Un exemple ? N’importe quel psychologue vous dira qu’il est très mauvais pour un enfant d’être élevé dans une famille monoparentale. Oui, oui, y a rien de pire paraît-il ! Qui m’a laissé le choix ? Mélanie a-t-elle voulu que son père et sa mère se fassent une guerre permanente ? Non plus ! Et les parents de Grégory ont-ils jamais souhaité que leur fils soit défoncé du matin au soir ? Evidemment non ! La liste serait interminable. Le train est lancé à grande vitesse sur la voie. Il pèse des centaines de tonnes et les freins ont lâché depuis belle lurette. En prime, il ne fait aucun doute que nous sommes à l’intérieur. Oui, la vie est un train fou ! Aucun bouquin ne peut nous procurer autant de sensations que la vie, et je suis décidée, pour ma part, à en savoir le plus long possible sur la question. »

Mon avis :

La première fois que j'ai été deux est le premier roman de Bertrand Jullien-Nogarède. Le résumé assez énigmatique a tout de suite attiré mon attention et, j’étais assez curieuse de découvrir ce qu’il pouvait renfermer.

Karen Traban est une brillante élève de terminale vivant seule avec une mère dépressive. À dix-sept ans, tandis que sa meilleure amie Mélanie cumule les aventures, Karen ne trouve pas d’intérêt à fréquenter les garçons de son âge. Elle préfère ses romans dans lesquels elle trouve de bien meilleurs compagnons. Depuis toujours, elle a vu sa mère malheureuse, dénigrant le couple, la passion. Ses convictions négatives quant à l’amour sont profondément inscrites en elle, si bien qu’il lui est impensable de s’aventurer dans le piège qu’est l’amour. Mais, lorsqu’un jeune Anglais intègre sa classe au milieu de l'année scolaire, la donne va changer. Avec son côté so british, il est à l’opposé de ce qu’elle a toujours connu et ne peut s’empêcher d’être charmée, de s’intéresser à lui malgré elle. C’est avec un certain fatalisme qu’elle se laisse aller à ses sentiments. Les choses vont cependant se compliquer lorsque Tom doit repartir en Angleterre.

Karen ne correspond en rien aux héroïnes que nous pouvons croiser dans les titres young-adult. Sombre et pessimiste, on a parfois du mal à se rappeler qu’elle n’est qu’une adolescente. C’est une héroïne double : elle est à la fois douce, effacée et timide comme pourrait l’être toute jeune fille. Mais, elle peut également se monter excessivement mature et avoir un côté cynique qui la pousse à avoir une forte conscience de ce qui se passe autour d’elle, à poser un avis négatif sur tout. J’ai parfois eu du mal à me retrouver en elle, à suivre ses longues introspections. Mais, ses réflexions sur la vie et l’amour m’ont semblé très justes et pertinentes. Karen va découvrir, au fil du lien qu’elle créait avec Tom, qu’une histoire d’amour peut influer sur son existence, nous faire faire certains choix… L’auteur aborde avec subtilité des sujets plus importants tels que la famille et l’amitié. L’ensemble est plutôt intéressant, si ce ne sont les trop longs passages de réflexions qui rendent l’intrigue un peu trop lourde et nous empêchent de nous attacher aux différents protagonistes.

Nul besoin d’être adolescent pour parcourir ou apprécier l’histoire d’une jeune femme en passe de devenir une adulte. On ressort de cette lecture avec de nombreuses questions sur la vie, sur l’amour… L’auteur nous propose une héroïne qui vit ses premiers émois, sa première relation amoureuse sérieuse ; un récit qui pourrait nous fait passer par une myriade d’émotions si Karen avait été plus accessible. J’aurais également apprécié que la fin de l’ouvrage se déroule moins rapidement, que l’auteur nous offre un prologue huit années plus tard.

★★★☆☆

Stéphanie

Bertrand Jullien-Nogarede a été bassiste dans un groupe de rock, c’est le moment où il a commencé à écrire ses premières chansons. Par la suite il a écrit des textes pour des artistes français et canadiens. Il a enseigné la littérature au lycée et l’histoire des idées à l’université. L’écriture a toujours fait partie de sa vie.




À propos de Sariah'Lit:

Stéphanie, férue de lecture et blogueuse depuis 2013. Elle ne passe pas une journée sans avoir un livre entre les mains pour s'évader.

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LES MOTS DOUX :

  1. Ah, finalement, tu n'as pas été si emballée que ça... Mais au final, tes points négatifs sont assez subjectifs (l'attachement ou pas à un personnage...), donc peut-être que ça pourrait le faire pour moi uand même :)

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    1. Il y a aussi les longues introspections ; certaines étaient un peu longue justement. Des dialogues en plus n'auraient pas été superflu si tu veux mon avis, pour casser cela et rendre Karen plus accessible. Après l'ensemble de ce qui est abordé est juste et faire réfléchir, donc ça reste intéressant à parcourir. Mais, je pense que ça ne parlera pas à tout le monde, qu'il manquera quelque chose pour certains lecteurs.

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